Black Ops est certainement la sous-franchise Call of Duty la plus atypique. Entre un premier épisode aux choix qui comptent et aux multiples fins, un deuxième et un troisième qui faisaient le grand écart entre les années 60 et le futur lointain, et un quatrième qui a carrément fait l’impasse sur toute campagne solo, les joueurs en ont vu de toutes les couleurs. Lors de sa révélation il y a deux mois, ce cinquième volet nous a promis un véritable retour aux sources, tendance guerre froide, complots gouvernementaux et années 80. Ce programme nous a sacrément mis l’eau à la bouche, et c’est donc avec ferveur que nous nous sommes lancés dans le mode solo, le mode multi, et le mode Zombies !
Les développeurs de Treyarch et Raven Software voulaient renouer avec les racines de la saga, et nous pouvons d’emblée vous confirmer que ce point a été parfaitement rempli. D’ailleurs, le premier épisode couvrait une période allant de 1961 à 1968, alors que la campagne solo de ce cinquième volet se déroule entre 1968 et 1981. On pourrait donc presque le considérer comme une suite directe, voire comme le véritable Black Ops 2. Le scénario nous plonge en pleine guerre froide, à la poursuite de Perseus, un mystérieux espion russe infiltré sur le sol américain. Des références plus ou moins évidentes au premier Black Ops parsèment la campagne, qui nous permet d’ailleurs de croiser une nouvelle fois la route de Hudson, Woods ou encore Mason. Comme au bon vieux temps, certaines missions nous demandent d’incarner ce dernier, même s’il ne s’agit pas du tout du personnage principal ici. Le jeu met plutôt en vedette Adler, un agent spécial de la CIA (non jouable) qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Robert Redford, à une vilaine cicatrice sur le visage près. Quant au soldat que l’on incarne dans la plupart des missions, il s’agit d’un agent surnommé Bell. Cold War dégaine alors sa première surprise puisqu’on a droit à une véritable création de personnage. Il est ainsi possible de choisir le prénom, le nom, le continent de naissance, la couleur de peau, le genre, le passé militaire (CIA, MI6 ou ex-KGB) ainsi que le profil psychologique de notre soldat. Cette dernière option permet de choisir deux caractéristiques parmi quinze, chacune d’entre elles ayant une petite influence sur le gameplay. Un Paranoïaque vise deux fois plus rapidement, un Loup solitaire possède un sprint plus long, un Survivant a droit à 25 % de santé supplémentaire, un Impatient est plus précis lorsqu’il tire en se déplaçant, et ainsi de suite. Naturellement, ces effets concernent uniquement le mode solo et non le multi. A noter que certains dialogues de la campagne font de discrètes références à vos choix, notamment en ce qui concerne le passé militaire retenu. Cette personnalisation du héros constitue un premier point assez atypique pour un Call of Duty, et nous allons voir que le jeu nous réserve pas mal d’autres (bonnes) surprises.
LES FINS JUSTIFIENT LES MOYENS
L’un des points forts de cette campagne réside dans la variété des niveaux et de l’action. Des missions sous forme de flashback nous replongent en pleine guerre du Vietnam, tandis que d’autres nous amènent à parcourir le Berlin de 1981 en tenue civile. Ukraine, Union soviétique ou encore Cuba sont également de la partie. Mais encore plus que la diversité des lieux, c’est la variété dans le gameplay qui nous a agréablement étonnés. Bien sûr, on a droit à la panoplie Call of Duty classique, à base d’explosions cinématographiques, de crash d’hélicoptères, de mitraillages à tout va et de corps à corps violents (mention spéciale pour la possibilité de choper un ennemi et de s’en servir comme bouclier humain). Mais le jeu sait également être plus subtil. Comme dans un “immersive sim” à la Deus Ex, il faut parfois s’infiltrer, crocheter manuellement des serrures et même planquer des cadavres dans des placards. Evidemment tout cela reste très léger par rapport aux références du genre, mais c’est tout de même bel et bien présent ! Il nous est même demandé à plusieurs reprises de faire des choix de dialogues. Certains d’entre eux constituent en réalité de fausses alternatives qui mènent au final aux mêmes réponses de la part notre interlocuteur, mais d’autres ont de véritable conséquences sur la suite du jeu. Il en va de même pour la possibilité de tuer ou d’épargner certains personnages, qu’on pourra alors retrouver ou non dans la suite de l’aventure. Au passage, nous avons dégoté trois fins majeures (dont une très surprenante pour un Call of Duty souvent taxé d’américanisme primaire…) et plusieurs variations secondaires. Mais revenons à l’aspect “immersive sim” qui culmine lors d’une mission se déroulant dans la Loubianka, l’immeuble du KGB. On y incarne un agent double russe, chargé de récupérer une clé électronique réservée aux haut gradés afin d’ouvrir la voie à Adler, Bell et quelques autres. Le jeu nous propose alors plusieurs manières d’arriver à nos fins, chacune d’entre elles faisant appel à l’infiltration. Il est possible de reprogrammer une clé vierge, d’empoisonner un général, de le faire assassiner par un prisonnier ou encore de le faire passer pour un traître. Etonnant, non ? Quant à l’avant-dernière mission, elle lorgne carrément du côté des séquences hallucinatoires de Far Cry et même de… Stanley Parable ! Comme quoi, ce Cold War n’est définitivement pas un Call of Duty comme les autres.
LES NOMBRES MASON, QUE SIGNIFIENT-ILS ?
Si jamais vous en doutiez encore, la planque berlinoise de l’équipe devrait achever de vous convaincre. Elle permet par exemple de discuter avec les différents membres de notre équipe, ces dialogues facultatifs ayant le bon goût de renforcer la caractérisation des personnages. Mais elle abrite également un “tableau des preuves”, qui regroupe différents documents (il y a pas mal de lecture, ce qui est évidemment une bonne chose) et permet également de sélectionner notre prochaine mission. En effet, en plus des missions principales, le jeu propose également des missions optionnelles, que l’on peut lancer quand on le souhaite. Mais avant de démarrer un de ces niveaux, le choix nous est laissé de résoudre une énigme à l’aide d’indices récoltés dans d’autres missions. Et là, miracle, on se retrouve à réfléchir dans un Call of Duty ! Il faut par exemple désigner des suspects parmi plusieurs candidats, en comparant des listes de noms, de dates et de descriptions. Ou, mieux encore, de décrypter une disquette en retrouvant des codes et des mots de passe à l’aide d’un tableau de nombres, d’un article de journal abritant des indices et d’une liste de codes et de villes. Pas de quoi se retourner le cerveau, mais on en connaît tout de même certains à la rédac qui ont bloqué sur cette énigme (par charité chrétienne et par respect pour Damien, nous ne les dénoncerons pas).
Etre amenés à réfléchir et à jouer les détectives dans un Call of Duty nous a franchement emballés… jusqu’à ce qu’on comprenne que les deux énigmes que nous venons d’évoquer sont en réalité les seules ! Il n’y a donc en tout et pour tout que deux missions optionnelles qui (indépendamment des énigmes qui leur sont liées, et dont la résolution est elle-même optionnelle) s’avèrent en plus être très courtes. Et c’est là qu’on commence à aborder les choses qui fâchent. Que la campagne principale puisse être bouclée en quelques heures seulement, on a l’habitude. Mais là, la variété des missions fait qu’on reste paradoxalement plus sur notre faim que d’accoutumée. Le jeu développe plein de bonnes idées, tente (et réussit) des choses audacieuses pour un Call of Duty, mais n’exploite vraiment pas assez tout cela. On aurait voulu plus d’énigmes et plus de missions comme celle de la Loubianka. On reproche souvent aux développeurs de trop tirer sur la corde, mais on se heurte ici au problème inverse.
BACK TO THE USSR
Il en va ainsi de l’apparition d’hommes politiques majeurs, tels que Ronald Reagan et Mikhail Gorbachev, parfaitement modélisés mais dont le temps d’écran se limite à quelques secondes chacun ! Pourquoi ne pas les avoir utilisés plus souvent et plus longtemps ? Quant à l’ambiance années 80 qui nous avait été promise à l’époque de la preview, elle souffle le chaud et le froid. Bon point pour les images d’archives utilisées ici ou là et qui nous permettent de revoir Reagan (le vrai, cette fois) ou Castro. Bon point pour la voix en allemand dans le métro berlinois. Bon point pour les vêtements et la décoration des bâtiments. Et très bon point pour tout ce qui concerne la modélisation des ordinateurs d’antan, dont les écrans cathodiques et les grosses touches nous replongent dans les années 70. D’ailleurs, en se cantonnant à la période 1968-1981, la campagne solo évoque finalement beaucoup plus les années 70 que les années 80. Même la bande originale laisse un goût de trop peu. Nos oreilles aguerries (tout de même aidées par Shazam pour certains titres…) ont ainsi reconnu Spirit in the sky de Norman Greenbaum (1969), Magic Carpet Ride de Steppenwolf (1968), The Stroke de Billy Squier (1981), Paul ist tot de Fehlfarben (1980) et Hit me with your best shot de Pat Benatar (1980). Seulement trois titres 80s, et loin d’être aussi cultes que le Blue Monday de New Order qui nous faisait saliver dans le trailer du jeu. Plus gênant encore, Cold War n’a pas jugé bon d’ancrer totalement son univers dans notre réalité. Ainsi, les affiches de concert et les jukebox affichent uniquement des noms de groupes inventés pour l’occasion.
De la même manière, on a droit à des noms de flippers fictifs ainsi qu’à des faux sodas, des fausses bières et des faux snacks. Seule exception sur ce dernier point : les Doritos. Ce qui, pour le coup, ressemble plus à un placement produit qu’à une volonté d’ancrer l’univers dans la réalité (surtout qu’on connaît l’historique de la marque en matière de partenariat gaming…). Tous ces détails diminuent la force de l’univers représenté. En revanche, Activision s’est fait plaisir (et à nous aussi par la même occasion) en intégrant dans les niveaux plusieurs bornes d’arcade leur appartenant. Et elles sont toutes jouables ! Il y a de quoi sensiblement allonger la durée de vie du mode solo, à condition de ne pas être allergiques aux très gros pixels qui tâchent, bien entendu. Pour notre part, nous avons disputé quelques parties de River Raid, Enduro, Grand Prix, Pitfall, Barnstorming, Fishing Derby, Chopper Command et Kaboom. Terminons ce tour du mode solo par un petit point sur la technique. Plus cross-gen que nex-gen, le jeu reste globalement très agréable à l’œil et, surtout, toujours extrêmement fluide. Nous n’avons eu droit à aucun plantage (de nos jours, cela devient rare…) et n’avons tiqué que sur deux points précis : les miroirs qui n’affichent aucun reflet et un script bien mal fichu, qui a fait apparaître par magie plusieurs ennemis à un moment précis, alors qu’on avait scrupuleusement nettoyé la salle auparavant. Pas de quoi gâcher une campagne solo réellement plaisante, et dont le principal défaut reste finalement son goût de trop peu.
UN MULTI SIMPLE, EFFICACE MAIS SANS GRANDE SURPRISE
Qui dit Black Ops dit forcément multijoueurs. Ce sont les opus de Treyarch qui ont d’ailleurs fourni le matériau de base pour plusieurs années de compétition eSport sous la forme de la Call of Duty World League. D’ailleurs, on rappelle que cet axe est tellement important que l’opus précédent n’avait tout bonnement pas eu droit à un mode solo. Call of Duty Black Ops IIII est un multijoueurs pur et dur. D’un simple coup d’œil aux différents menus, on comprend que ce Black Ops Cold War va nous proposer un vaste choix d’activités, même si la plupart ont un goût de déjà-vu. En réalité, Treyarch a repris la totalité des modes classiques de Call of Duty, pour s’assurer l’adhésion des fans d’une part, mais peut-être aussi pour éviter de complexifier un développement qui aura dû être fait en deux ans à peine, avec plusieurs mois de confinement en prime. On retrouve donc les modes classiques avec Domination, kill confirmed, team deathmatch, hardpoint et control. Néanmoins, deux nouveautés sont au menu, avec l’arrivée des modes Dirty Bomb et VIP. Le premier vise à offrir une expérience qui se rapproche au maximum de Battlefield avec de vastes maps remplies de véhicules, et 40 joueurs en simultané. Répartis en 10 équipes de 4, les joueurs devront aller récupérer de l’uranium, puis en faire une bombe « sale » qu’il faudra faire exploser. L’équipe qui gagne est celle qui a fait sauter le plus de bombes avant la fin du temps imparti.
Il faut préciser que ce mode est particulièrement dynamique, car les opposants sont hyper nombreux, et l’action est un sacré bordel entre les véhicules qui foncent, et la pollution générée par les bombes sales qui ont déjà sauté. L’autre nouveauté concerne le mode VIP, et si ce dernier est inédit dans la série Call of Duty, il devrait rappeler des souvenirs à ceux qui ont joué à Counter-Strike 1.6. Il s’agit en effet d’une copie du mode qui faisait fureur dans les années 2000 sur les maps au préfixe as_ (as_oilrig est probablement la carte la plus connue). Dans ce mode, deux équipes de six se font face, sachant qu’un jour d’une équipe est désigné comme étant le VIP. L’élu va devoir se contenter d’un Colt.45, et devra rejoindre l’un des deux points d’extraction disponibles dans le temps imparti. L’équipe adverse devra bien sûr l’en empêcher en le tuant, ou en le ralentissant assez. Très nerveux ce mode nous a fait remonter de bons souvenirs, et il se prête particulièrement bien au style de jeu des Black Ops, où la mort est toujours plus rapide.
CANNIBAL CORPSE
La personnalisation du personnage ne devrait pas dépayser les habitués de la franchise, puisqu’on retrouve le système de loadouts (attirail en VF). Ce dernier permet de créer librement l’équipement de notre personnage, indépendamment des classes préétablies. Il faudra toutefois débloquer au préalable les diverses armes et leurs accessoires en empilant les points d’XP. Chaque arme dispose d’un certain nombre de slots, ce qui va permettre d’ajouter de nombreux accessoires, et d’en modifier assez radicalement les caractéristiques. Pour autant, le feeling des armes, et la meta globale du jeu n’évoluent pas radicalement, et on sent que les développeurs ont dû conserver une sorte d’harmonie afin de ne pas mettre en péril l’équilibre du battle-royale Warzone qui arrivera quelques temps après la sortie du jeu. L’un des plus grandes nouveautés concerne la mutation du système de Killstreaks en Scorestreaks. Concrètement, l’idée est toujours d’offrir de l’appui-feu aux joueurs qui enchaînent les kills, mais désormais, lorsqu’on meurt, le compteur n’est plus remis à zéro. Ce changement permet à tous de bénéficier du système, et plus seulement aux meilleurs du serveur. Cela va aussi décourager certains joueurs qui campaient pour pouvoir faire monter leur jauge en minimisant les risques de tout perdre. Pour la sortie du jeu, 13 maps multi sont prévues, sachant que les développeurs ont déjà prévu d’en ajouter d’autres avec le temps.
Mais le multi ne s’arrête pas aux modes compétitifs traditionnels. Cold War marque le retour du très attendu mode Zombie. Comme toujours, ce dernier va envoyer une équipe de plusieurs joueurs sur une map gigantesque, dont on devra ouvrir les portes afin de pouvoir élargir la zone de jeu. Si vous êtes un habitué, sachez que les objectifs ne changent pas d’un iota. Il faudra d’abord survivre au maximum de vagues d’ennemis, mais aussi résoudre une énigme particulièrement complexe qui nous demandera de parcourir la map de long en large, et de faire face au danger. Bien sûr, chaque zombie tué rapporte un peu d’oseille, et il faudra toujours gérer habilement ses fonds afin de pouvoir améliorer ses armes et son équipement, tout en continuant à explorer la map, sans jamais que le nombre des ennemis ne devienne un problème. L’autre mode qui fait son grand retour avec ce Cold War, c’est le Dead Ops. Déjà présent dans Black Ops 3, ce top-down shooter particulièrement déjanté propose une expérience qui peut être compétitive ou coopérative en fonction de vos envies. En effet, chaque joueur dispose de son propre score, ce qui pousse à se surpasser, mais comme dans le mode zombie, il faudra aussi tenter d’aller le plus loin possible dans les niveaux. Bien plus loufoque que le mode zombie, le Dead Ops propose de nombreuses armes inédites (un lance lames de scie, des blasters, une gateling et même un mécha), et il n’est pas question de compter ici les munitions, puisqu’elles sont illimitées. Bref, du fun à plusieurs sans se prendre la tête, avec une ambiance particulièrement déjantée : on ne va pas se plaindre.